Suite à la venue de Gérald Darmanin, hier, à Besançon, Laurent Croizier, le député doubiste de la majorité présidentielle se réjouit des avancées concernant l’implantation d’un second commissariat de police à Besançon. « C’est la concrétisation d’un travail de près de deux ans. Je suis heureux d’avoir convaincu Gérald Darmanin de sa nécessité » rappelle le parlementaire. Et de conclure : « Cette annonce rassure les habitants qui ont tant besoin de sérénité. Il envoie, de plus, un message fort aux délinquants, réaffirmant que le quartier est un territoire de la République ».
Anne Vignot, maire de Besançon, était à la Sorbonne, ce jeudi après-midi, à la réunion des Maires des villes touchées par les émeutes urbaines de juin dernier. Au cours de ce moment, Elisabeth Borne a annoncé que le quartier Planoise était retenu pour expérimenter le dispositif « forces d’action républicaine ». Par ailleurs, la maire de Besançon demande des besoins supplémentaires de l’état pour répondre aux questions de parentalité et de prévention. Par ailleurs, la Ville maintient sa demande pour l’implantation d’un commissariat à Planoise et un renfort de policiers nationaux.
Le député Renaissance Laurent Croizier réagit aux tirs à l’arme automatique survenus, dimanche matin, à Planoise. Aucune victime n’est à déplorer. Le parlementaire s’inquiète pour la sécurité des habitants du quartier. Il appelle la maire de Besançon à renoncer à son projet de réorganisation de la police municipale, « qui supprimera la brigade dédiée au quartier de Planoise ». Il lui demande « d’accepter l’installation de nouvelles caméras de vidéoprotection à Planoise et aux entrées et sorties de la ville ». Dans le même temps, M. Croizier réitère à l’état sa demande de créer un second commissariat de police à Besançon.
Aly Yugo, le conseiller départemental bisontin lance un appel pour ce soir et demain pour créer un mouvement parents-enfants-citoyens. Déjà présent à Planoise lors des dernières émeutes, l’élu demande à celles et ceux qui le souhaitent de venir nombreux sur les quatre zones de Planoise. Les citoyens volontaires doivent se rendre à partir 22h30, vêtus d'un tee-shirt blanc, sur le parking Intermarché. "Nous veillerons tous ensemble à ce que les festivités se passent dans les meilleures conditions de respect et solidarité citoyenne" relate le communiqué de presse.
Il y a la volonté politique, mais aussi le respect de la personne et de sa dignité. La gestion de la démolition des immeubles 2,4, 6 et 8 rue de Champagne, prévue dans le cadre de la rénovation urbaine du quartier Planoise, à Besançon, pose question et interpelle. Michel Boutonnet, militant à l’Union Locale de la Confédération Nationale du Logement (CNL) dénonce une gestion « inhumaine », « qui ne tient absolument pas compte des gens et de leur vie ». Mobilisée depuis le mois d’avril dernier aux côtés des locataires, l’association pointe « le mépris » des différents acteurs et leur fonctionnement à marche forcée. Il a fallu d’ailleurs en passer par une mise en demeure pour espérer obtenir des réponses aux nombreuses interrogations. A ce jour, LogeGBM, le bailleur social, s’est enfin résolu à cesser son mutisme. Une réunion était prévue hier soir, mais les orages ont contraint l’organisme à annuler le rendez-vous, que les locataires attendaient depuis de nombreuses semaines.
Une situation intolérable
Michel Boutonnet pointe tout particulièrement la politique de l’ANRU, l’Agence Nationale pour la Rénovation Urbaine, qui oublie « les humains » qui vivent, parfois depuis 53 ans, dans ce quartier et ces appartements. « Ils ne connaissent pas ces gens. Ce sont des pions pour eux » explique-t-il. Des propos que confirment les concernés. « On fait tout pour nous mettre dehors » ajoute cette dame. « On nous fait vivre dans des conditions lamentables. Une personne s’est vu proposer un relogement dans un quartier, dans un appartement au loyer plus cher et d’une superficie plus réduite ». Que dire également de l’insalubrité et de l’insécurité qui règne. « J’ai été inondé la nuit parce qu’ils avaient coupé l’arrivée d’eau d’un radiateur. Les appartements vides sont squattés. Le nettoyage et la désinfection des appartements vacants ne sont plus assurés. Désormais, nous avons des rats et des pigeons comme locataires ».
Douloureux déracinement
Les travaux de déconstruction des tours concernées devraient débuter dans un an, durant le 2è semestre 2024. « Ce n’est pas que cela m’angoisse, mais cela me met mal à l’aise. J’ai mes connaissances depuis que j’habite ici. J’y suis depuis 1971. Ce n’est pas facile » ajoute cette dame. Informés sur ce projet d’une façon très cavalière, les locataires ne désarment pas. Ils comptent sur le soutien de la CNL locale pour les défendre. Pour l’heure, aucune nouvelle rencontre n’est programmée avec LogeGBM, après l’annulation de mardi soir.
Le reportage de la rédaction : des locataires et Michel Boutonnet
Des violences urbaines ont éclaté dans certains quartiers de Besançon, comme dans le reste de la France, suite à la mort de Nahel. Le quartier prioritaire de Planoise a été particulièrement touché. Alors, comment comprendre cette colère et agir à long terme pour une jeunesse et un quartier souvent enclavés ?
Tentatives de réponses dans ce dossier avec, en troisième partie, le témoignage d’une professeure, Sandrine Cadon, exerçant à Planoise au lycée Tristan Bernard.
Vous pouvez aussi découvrir les deux premiers épisodes sur l’association Miroirs du monde et le Club Sauvegarde.
“Comment je vois mes élèves ? Bah c’est des adolescents”
Le lycée professionnel Tristan Bernard accueille 450 élèves pour 52 professeurs. Le profil de recrutement est varié. Il se fait dans le quartier mais aussi dans les communes environnantes. Sandrine Cadon, qui exerce depuis 27 ans dans cet établissement, affirme que ses élèves “viennent bien volontiers au lycée, ils s’y sentent bien”. “C’est des adolescents tout simplement, mais avec des conditions familiales souvent particulières”. Elle concède que l’autonomie est moins importante qu’en lycée général : “les élèves s'enfuient à la sonnerie”. La professeure d’arts plastiques, syndiquée à la CGT, rejette l’analyse de l’Education Nationale qui, selon elle, est idéaliste. “On pense que chaque élève a son petit bureau et du temps pour travailler le soir. La réalité c’est que, quand ils rentrent, ils doivent s’occuper d’une famille et n’ont pas les conditions pour étudier”.
“On est plus souvent dans l’émotion que l’apprentissage”
Ces situations familiales et sociales empêchent le rythme de travail, mais aussi les activités extra-scolaires. Sandrine Cadon observe que, en dehors des internes, de moins en moins d’élèves viennent aux sorties organisées au théâtre ou au cinéma. La nouvelle réforme du lycée professionnel “a des aspects intéressants” selon elle, comme le retour d’une année supplémentaire, “mais seulement pour une faible part d’élèves voulant s’engager dans le supérieur”. Globalement, l’enseignante expérimentée voit dans la baisse des moyens et l'augmentation du nombre d’élèves par classe les causes du niveau important de décrochage scolaire.
“Il faut redonner confiance à l’école” conclut Sandrine Cadon.
Le podcast de la rédaction / Sandrine Cadon
Depuis jeudi dernier, des violences urbaines éclatent dans certains quartiers de Besançon, comme dans le reste de la France, suite à la mort de Nahel. Le quartier prioritaire de Planoise est particulièrement touché. Alors, comment comprendre cette colère et agir à long terme pour que cette situation structurelle ne se reproduise pas ?
Tentatives de réponses dans ce dossier avec, en première partie Fodé Ndao, champion de karaté et fondateur du Club Sauvegarde.
Réfléchir, avant tout. C’est ce que Fodé Ndao ne cesse de répéter aux jeunes qu’il encadre et à son propre fils. On le rencontre au 6 rue Pablo Picasso, le Club Sauvegarde, en plein cœur du quartier de Planoise. Avant de mener l’interview, le champion de karaté nous demande quelques minutes pour régler un conflit à propos d’une sortie au lac avortée au sein du club. Pour comprendre les tensions, la recette est simple : écouter, chacun, chacune. Avant d’émettre un quelconque avis, Fodé veut entendre tout le monde isolément.
Cet exemple met en lumière l’avis et la philosophie de vie du karatéka qui “voit dans le sport les valeurs fédératrices” d’où peuvent émerger la paix.
Le sport, une visée éducative
Fodé est vice-champion du monde de karaté et plusieurs fois champion d’Afrique. Véritable légende dans son quartier et dans son pays d’origine, le Sénégal, il veut mettre à profit son expérience pour éduquer les jeunes. Dans son Club Sauvegarde, fondé en 2003, il discute tous les jours avec des mineurs et essaie d’initier chez eux des réflexions, sans imposer son point de vue. Le sport, pour lui, “n’est pas politique”. Éloigné de ces considérations, il peut avoir des “valeurs éducatives” avec les moments de partage qu’il suscite. Quand on lui demande si l’Etat est assez présent pour l’aider dans son action, nécessaire et bénéfique dans ce quartier, Fodé affirme : “il ne faut pas toujours se demander ce que l’Etat peut faire pour nous, il faut aussi se demander ce que l’on peut faire pour l’Etat”. Il remercie les collectivités pour leur aide financière mais estime que c’est par les relations humaines, avant tout, que la société peut sortir par le haut.
Préférer la responsabilité de chacun à la responsabilité des parents
On entend beaucoup dans les médias que la responsabilité de ces violences, réalisées par des très jeunes, revient en premier ordre aux parents. Fodé préfère imputer un rôle à toute la société qu’il voit “comme un village”. “Le village, c’est le boulanger, le voisin, le passant, l'instituteur qui doit être respecté par tout le quartier”. Chaque personne sur le passage d’un jeune le construit. Et quant au rôle des “grands frères”, c’est un terme fondé politiquement selon lui. La responsabilité doit être collective pour Fodé et la solution dans le dialogue.
“Les violences, on ne les traite pas, on les juge”
Ce dialogue, il ne peut être seulement répressif et Fodé déplore le jugement de ces violences, sans compréhension. Dans ses actions, comme avec l’initiative des caravanes des pieds d’immeubles qui débute dès ce lundi 10 juillet, il prône le dialogue. Cet évènement, qui présente des activités sportives aux jeunes, durera près de deux mois dans six quartiers différents de Planoise. Il est réalisé en collaboration avec le Centre de loisirs de jeunes de la Police Nationale.
Le podcast de la rédaction/ Fodé Ndao
Demain, cela fera une semaine que Nahël a été tué lors d’un contrôle de police à Nanterre. Depuis ce drame, chaque soir, des émeutes enflamment les quartiers dans toute la France. A Besançon, des incidents ont éclaté particulièrement dans les quartiers de Planoise et Clairs-Soleil. Une agence bancaire a été brûlée, des feux ont été déclenchés sur la route, des véhicules ont été incendiés et quelques boutiques ont été pillées. Le parquet de Besançon est très clair : des interpellations auront lieu très prochainement.
« Je peux vous assurer qu'il y aura des poursuite »
Cette vague de violences ne laisse pas les forces de l’ordre impassibles. Elles ont déjà procédé à une saisie impressionnante ce vendredi, dans le quartier de Planoise, en confisquant 54.000 mortiers et artifices dans un commerce de la place Cassin. Etienne Manteaux, le procureur de la République de Besançon, tenait une conférence de presse ce lundi matin, pour assurer que le maximum sera fait afin d'identifier les auteurs de ces incivilités. Il a rappelé les faits les plus graves, survenus dans la nuit de jeudi à vendredi, comme l’incendie de l’agence bancaire Crédit Mutuel ainsi que le pillage de l’Euro Market et d’un débit de tabac. S’il n’y a pas eu d’interpellation le soir des faits, les policiers n’étant pas en nombre suffisant, Etienne Manteaux a bien précisé qu’il y en aurait très prochainement. Pour l’heure, les caméras et la vidéosurveillance sont analysées par les enquêteurs de la police judiciaire et de la sûreté départementale. « Cela va nous permettre d’élucider et d’identifier très clairement certains faits. Dans les jours et semaines à venir, au fur et à mesure de l’identification formelle de certains auteurs de ces dégradations par incendie, de ces vols aggravés par plusieurs circonstances, je peux vous assurer qu’il y aura des poursuites. Nous allons procéder à des interpellations » promet Etienne Manteaux. Pour rappel, les dégradations par incendie ou vols aggravés par trois circonstances sont punis de dix ans d’emprisonnement.
Etienne Manteaux, le procureur de la République de Besançon :
Les parents, civilement responsables, cités devant le tribunal
Actuellement, 9 individus ont été interpellés dans la nuit de vendredi à samedi et 4 dans la nuit de samedi à dimanche. Un homme en possession de masques et d’engins pyrotechniques a été placé en garde à vue. Deux mineurs à proximité d’un véhicule incendié ont aussi été interpellés. D'abord pris en chasse, l’un d’entre eux a laissé échapper une bouteille d’essence lors de sa fuite. Les policiers, après les avoir rattrapés, ont aussi constaté des traces de brûlures au niveau du visage de l'un de ces individus. Des adolescents très jeunes, inconnus de la justice, qui seront présentés à un juge pour enfant en présence de leurs parents. Ces deniers auraient été motivés par l’élan grandissant des réseaux sociaux. Mais Etienne Manteaux prévient : « Les parents sont civilement responsables. À ce titre, ils seront cités devant le tribunal. On ne peut pas impunément casser et violenter. Les parents ont des obligations »
Vendredi dernier, le quartier de Planoise a de nouveau été le théâtre d’un drame sur fond de trafic de stupéfiants. Un homme de 48 ans, de nationalité bosniaque, a été retrouvé encore conscient dans une marre de sang, rue de Fribourg, aux alentours de 20h. Le témoin l’ayant retrouvé a alerté les pompiers et forces de l'ordre, tout en pratiquant les premiers gestes de secours. Malheureusement, la victime est décédée peu après au CHU de Besançon.
Grace à plusieurs témoignages recueillis, aux images des caméras de vidéosurveillance, et aux infirmations de la Brigade Spécialisée de Terrain (BST), deux suspects ont été interpellés ce dimanche 25 juin dans un appartement à Besançon. Le premier est un mineur, qui atteindra la majorité en novembre 2023. Le second, un quarantenaire, est le titulaire du bail de l’appartement.
Un couteau retrouvé dans un mélange de javel et de white spirit
Après une perquisition du logement, les forces de l’ordre ont retrouvé un bocal dans lequel trempait un couteau, le manche dans une solution de javel et de white spirit. S’il est encore trop tôt pour déterminer s’il s’agit de l’arme du crime, « cela pourrait être compatible avec celle-ci » a indiqué le procureur de la République, Etienne Manteaux, ce mardi après-midi. Les empreintes du jeune homme de 17 ans ont été retrouvées sur ce couteau, qui a été saisi pour des expertises plus approfondies. Pour rappel, la victime est décédée suite à un coup d’un objet tranchant au niveau de la zone cardiaque, endommageant le cœur et entraînant une hémorragie interne.
Un jeune très défavorablement connu de la justice
Très vite, le quarantenaire a affirmé ne pas être au courant de cette affaire. Il a expliqué avoir seulement hébergé le jeune homme de 17 ans sur la demande d’une tierce personne, et lui avoir fourni des produits d’entretien. Après un séjour en garde à vue, il a été relâché. Contrairement au mineur, bien connu de la justice. En effet, ce dernier qui est arrivé à Besançon depuis peu de temps, a été condamné de très nombreuses fois par le tribunal pour enfants de Lyon. Il faisait d’ailleurs l’objet d’une peine de 6 mois d’emprisonnement. S’il conteste ce meurtre, il reconnaît être arrivé au sein du quartier de Planoise pour effectuer « le conditionnement de produits stupéfiants ». Un casier déjà bien rempli pour un si jeune âge, mais également des antécédents qui interrogent. Le 24 juin dernier, le jeune homme s’est rendu dans une pharmacie pour se soigner une plaie à la main, en dérobant des antiseptiques, et en se montrant particulièrement agressif envers une pharmacienne, notamment en lui crachant dessus. Par ailleurs, 4h avant le meurtre, le mineur venait d’être frappé, « corrigé sévèrement » par un individu, a dévoilé le procureur de la République. Il ne s’agissait cependant pas de l’homme retrouvé mort. Conduit au CHU Minjoz par des proches, il en est très vite ressorti, refusant des soins, et se rendant très vite sur le point de deal sur lequel il venait d’être molesté. Enfin, des témoins ont affirmé que le jeune homme suivait la victime en trottinette, peu avant les faits. Il a été placé en détention provisoire, et sera poursuivi pour assassinat.
« Il s’agit du 6ème homicide en moins de 10 mois à Besançon. C’est un constat accablant, même si j’atteste de tous les efforts des services de police et de leur rapidité » a déploré Etienne Manteaux, le procureur de la République.
Après quatre jours d’un procès sous haute surveillance, le tribunal correctionnel de Besançon s’est prononcé concernant le gang « Picardie » de Planoise. Les juges sont restés proches des réquisitons prononcées par le ministère public, en condamnant les membres de ce clan, impliqués dans les violences et le trafic de stupéfiants, à des peines allant de 1 à 10 ans de prison. En cavale, le chef présumé écope de la plus lourde peine. S’ils ont majoritairement reconnu prendre part au trafic de produits stupéfiants, les délinquants ont été moins loquaces sur les conversations cryptées, récupérées par les enquêteurs au cours de l’instruction.