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Jura : Le tour du Monde en huit ans de Caroline Moireaux

Publié le 14 Jui. 2023 à 17:06
Tags: société | defi personnel | expedition |
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Jura : Le tour du Monde en huit ans de Caroline Moireaux Photo : caroline Moireaux

La Jurassienne Caroline Moireaux (43 ans), originaire de Cosges,  vient de sortir le 1er tome de sa trilogie qui revient sur le Tour du Monde qu’elle a effectué entre 2011 et 2019. 30 pays ont été traversés et 53.000 kilomètres ont été parcourus. L’aventurière, qui a quitté son emploi d’ingénieure pour se lancer dans ce périple, a notamment traversé à pied la Serbie, le Monténégro, la Turquie, la Chine, le Japon, le Mexique et le Salvador, et a parcouru la Mongolie, la Russie, le Canada et les États-Unis à vélo. Un projet salvateur et formateur. Rencontre…

Qu’est ce qui fait que l’on a envie de partir et de tout plaquer ?

Je me souviens de propos de Paulo Coelho qui disait : « Il est normal d’avoir peur d’échanger contre un rêve ce que l’on a réussi à obtenir. Alors pourquoi dois-je écouter mon cœur parce que tu n’arriveras jamais à le faire taire ? Et même si tu feins de ne pas entendre ce qu’il te dit, il sera là dans ta poitrine et ne cessera de te répéter ce qu’il pense de la vie et du monde ». Tout est parti de là. Un jour, je lisais cette phrase. Je revenais d’un voyage en Australie, et cela m’a fait beaucoup réfléchir. Je la trouvais  très juste. J’avais le souvenir que j’avais envie de voyager. Les hasards d’internet font également que j’étais tombée sur un projet de jeunes qui se préparaient à faire le tour du Monde à pied. J’avais trouvé cela extraordinaire. Quelques années plus tard, je me suis renseignée sur ce qu’ils devenaient. J’en ai contacté un. J’ai regardé un reportage sur eux. Et je me suis dit, moi aussi je vais me lancer. Je vais préparer mon tour du monde à pied.

Comment vous êtes-vous préparée, vous, l’ingénieure de formation ?

Je ne suis pas partie sur un coup de tête. Je n’étais pas une randonneuse à la base. Je ne partais de rien. J’ai mis neuf mois à le préparer quasiment quotidiennement.  Mon CCD s’était terminé. J’ai préparé mon matériel pour que cela soit léger. Il a fallu préparer aussi l’itinéraire, en tenant compte de la géopolitique. A savoir, les pays qui sont en guerre, ceux qui ne le sont pas, ceux, où l’on peut aller. J’ai parcouru 18.000 kilomètres à pied. 13.000 en vélo. J’ai utilisé le bateau également.

Que vous a apporté ce périple ?

Il m’a permis  d’appréhender différemment la vie et certaines choses. On apprend beaucoup de l’autre et de nous. Etre au contact de l’autre et d’avoir ses effets miroirs nous permettent de progresser. J’ai appris à mieux communiquer. Comment interprète-t-on ce que l’autre nous dit ? Comment interprète-t-on les évènements qui nous arrivent ? Apprendre que tout se passe à l’intérieur de nous-même. C’est déjà un grand pas.

Que fait-on durant toutes ces heures de marche ?

On réfléchit. Moi, je réfléchis énormément. Au début, je ruminais beaucoup dans ma tête. Puis, petit à petit, on apprend à lâcher. J’observe beaucoup ce qui se passe autour de moi. C’est hyper nourrissant. Vous savez, le langage verbal, ce n’est pas grand-chose dans la communication.

Avez-vous l’impression d’avoir repris vos anciens schémas de vie ? Cette expérience est-elle toujours  ancrée en vous ?

Elle est bien évidemment encore très ancrée en moi. Il ne faut pas se leurrer, dans la vie, les mauvaises habitudes reviennent très vite. En rentrant, j’ai fait beaucoup de stages. J’ai pris du temps pour réfléchir sur tout ce qui m’était arrivée pendant ce Tour du Monde. Si nous ne sommes pas vigilants sur nos manières d’agir, les vieux schémas reviennent très vite.

Avez-vous douté ? Avez-vous connu le découragement ? Auriez-vous pu renoncer ?

Je n’ai pas l’impression d’avoir vécu des difficultés. Par contre, j’ai vécu des expériences plus ou moins agréables. Ce sont des choses qui arrivent et on compose avec. Dix ans, c’était la limite que je m’étais fixée. Ca n’a duré finalement que huit ans. A un moment donné, j’ai eu envie de faire autre chose. Cela n’a pas été facile car il a fallu que je me batte avec mon égo. Tant pis, je ne suis pas allée en Amérique du Sud.

Jugez-vous que cette aventure fut une thérapie ?

Lorsque je suis partie, je n’avais pas de questionnements. C’est avec un grand élan de bonheur que je suis partie Par contre, je suis revenue avec plein de réponses. Ce n’est pas tant le voyage qui était thérapeutique, mais l’écriture du livre ensuite. Devoir poser des mots sur toutes ces réponses, faire face à ces questions que je ne me posais même pas auparavant. J’ai décidé d’écrire un livre en trois tomes. Le premier a déjà déclenché certaines compréhensions en moi. Je ressens déjà quelques petites appréhensions sur l’écriture du troisième.

Pouvez-vous nous raconter ce projet littéraire ?

Le titre pourrait être « huit ans autour du Monde à pieds, mais pas que… ». Le premier est sous-titré « Le grand départ » et raconte cette aventure entre la France et l’Azerbaïdjan, et les dix pays traversés. On y retrouve le récit du voyage. On y retrouve toutes ces rencontres, tous ces cadeaux que l’on a pu me faire. Toute cette richesse que sont ces rencontres en voyage. De temps en temps, je fais des apartés, où j’évoque des choses plus personnelles et profondes. Ce qui a été ma compréhension de ce qui a pu m’arriver.

Aujourd’hui, avez-vous retrouvé votre place dans la société jurassienne et française ?

Je fais des conférences. J’ai fait un film à mon retour. Je suis auto-entrepreneuse. Je n’ai pas repris une vie métro-boulot-dodo, avec un métier classique. Je vis de ce partage d’expériences. Je vais dans des associations, des entreprises ou des festivals pour présenter le film, qui sert de support de base.

Seriez-vous prêtes à repartir ?

Il y a un projet qui me tient à cœur. Après l’écriture et la publication de mes trois livres, j’aimerais, sur une période plus courte, refaire le même tour du Monde pour retourner voir les gens qui m’avaient invités. Ce sont majoritairement des personnes âgées. J’aimerais partir avec une ou un caméraman,  filmer et rendre hommage à ces gens en faisant des mini-reportages.

L'interview de la rédaction : Caroline Moireaux

Dernière modification le mercredi, 14 juin 2023 17:33