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Mercredi, Bruno Le Maire a annoncé sur RTL que Total Energies maintiendra le plafonnement du prix de ses carburants à 1,99 euro le litre durant l’année 2024. Le ministre s’est félicité de cette décision. Reconnaissant qu’elle représentait « une vraie protection » pour le portefeuille et le pouvoir d’achat des Français.

Après avoir connu une hausse significative tout l’été, les prix du gazole et du SP95-E10 ont légèrement baissé au cours de la semaine dernière. Il s’agit d’une baisse respective de 3 et de 3,4 centimes. Le litre s’établit désormais à 1,91€ en moyenne. Une telle diminution ne s’était pas vue depuis début juillet.

A l’issue d’une réunion à Matignon, ce mardi, avec les principaux distributeurs, le gouvernement a annoncé « près de 120.000 opérations » de vente de carburant à prix coûtant « dans 4.000 stations ». Les enseignes Carrefour et Leclerc devraient réaliser de telles opérations tous les jours. Casino, Cora et Intermarché se mobiliseront deux week-ends par mois. Enfin, Système U et Auchan ont prévu des actions au moins un week-end par mois.

C’est une décision qui ne passe pas. A compter du 1er décembre, les professionnels pourront vendre leur carburant à perte. Une action commerciale qui est interdite depuis 1963. Le gouvernement entend modifier cette règle pendant six mois pour essayer de faire baisser le prix de l’essence à la pompe. Hier, les dirigeants des principales enseignes de la grande distribution ont clairement refusé de mener cette politique tarifaire. Ils sont suivis également par les distributeurs indépendants.

A Morteau, Guillaume Rognon, le chef des ventes de l’entreprise familiale, dénonce une décision gouvernementale qui manque de logique. Pour des raisons économiques et d’équilibre financier, la société ne peut se permettre de vendre à perte. L’entreprise doit pouvoir vivre économiquement et « pas question de faire de la gratuité ». Pour le responsable haut-Doubiste, « seule une baisse des taxes permettrait de faire baisser durablement  les prix à la pompe ». Selon lui, «  cette mesure est inapplicable ». «  Elle ne pourra  d’ailleurs pas se mettre en place » avance-t-il.

« C’est porte ouverte à tout le monde »

Guillaume Rognon démontre l’absurdité d’une telle décision. « Quid des autres activités. On va alors  demander aux transporteurs de travailler à perte pour alimenter les supermarchés ? » s’interroge-t-il. Et de continuer : « avec un prix de vente inférieur de 2 centimes au prix d’achat, nous perdons jusqu’à 50.000 euros par mois ». Le professionnel ne voit pas quels types de compensation pourraient être proposés par le gouvernement.

Et l’avenir ?

Difficile de savoir quand un retour à la normale pourrait être amorcé. Le contexte international est à l’origine de cette situation. « Depuis la fermeture des vannes par la Russie, les autres canaux d’approvisionnement sont plus couteux ». La spéculation est bien réelle. « En une journée, les prix peuvent changer de 3 à 4 centimes en quelques heures » conclut M. Rognon.

L'interview de la rédaction / Guillaume Rognon

 

L'invasion russe en Ukraine a entraîné une explosion des cours du pétrole et du gaz, le premier évoluant actuellement largement au-dessus de 120 dollars, pas loin de ses records historiques, tandis que le second a franchi des niveaux inédits. Une situation qui se répercute sur tous les consommateurs. L'Insee prévoit une inflation à 5,4% en juin, tirée par les prix de l'énergie et des prix alimentaires.

 

Une forte dépendance aux énergies Russes

L'Europe est toujours extrêmement dépendante de l'énergie russe, mais ce dimanche, les pays du G7 se sont entendus pour durcir les sanctions vis-à-vis du Kremlin. Le Canada, le Royaume-Uni, l'Allemagne, les États-Unis, la France, le Japon et l'Italie se sont tous engagés à éliminer progressivement leur dépendance vis-à-vis de l'énergie russe. Cela passe par la réduction progressive ou plus radicalement par l’interdiction de l'importation de pétrole russe. Une mission compliquée étant donné que l’année dernière encore, la Russie était le premier fournisseur des vingt-sept membres de l’UE.

« La bonne réponse que nous connaissons c'est l'indépendance totale » avait indiqué Bruno Le Maire il y a quelques mois. Le ministre annonçait que le gel des prix du gaz en France étendu à la totalité de l'année coûterait au moins 10 milliards d'euros, tandis que la facture totale du soutien à l'énergie cette année serait d'au moins 20 milliards. En précisant « qu'il y a fort à parier qu'elle sera plus élevée ». « L'Etat ne peut pas être l'assureur en dernier recours de l'augmentation des prix de l'énergie », a toutefois prévenu le ministre de l’économie et des finances. La crise énergétique actuelle marquée par une forte inflation est « comparable en intensité, en brutalité, au choc pétrolier de 1973 » affirmait Bruno Le Maire.

 

A Keolis Besançon Mobilités, un service assuré et inchangé

« Nous sommes également impactés par cette problématique du coût de l’énergie de manière générale » souligne Carol Ambrosini, directeur marketing client et mobilités chez Keolis, le délégataire de Ginko pour le Grand Besançon Métropole. Cette énergie représente environ 6 à 7% des charges de l’entreprise. « Mais on a la chance, en tant que gros consommateur, d’avoir des accords et un groupement de commandes avec les différents réseaux de Keolis qui permettent d’avoir des prix plus accessibles que les particuliers, et de limiter le coût de carburant et de l’énergie de manière plus générale. Lorsque l’on commande une quantité et de l’énergie au même distributeur, il y a forcément des économies d’échelle qui sont générées derrière » poursuit Carol Ambrosini. Que les bisontins et grands bisontins se rassurent, pour l’heure aucune pénurie de carburant n’est envisagée, selon Keolis Besançon. Dans ce cas de figure, les transports publics sont prioritaires, au même titre que les véhicules d’urgence et ceux des forces de l’ordre. Même constat concernant l’offre proposée, et les tarifs. « Aujourd’hui, on peut dire qu’il n’y aura pas d’impact sur l’offre des transports proposée par Grand Besançon Métropole. Les tarifs n’évoluent pas, et les transports publics peuvent rester cette alternative pour les déplacements des bisontins et grands bisontins » précise Carol Ambrosini.

 

Quelques chiffres :

Sur la partie urbaine, 115 véhicules circulent (bus & tram). Ils effectuent environ 5 millions de kilomètres par année.

30% de la flotte de bus fonctionne au gaz, et le tram à l’électrique. Le reste au gasoil. 1,5 million de litres de gasoil ont été consommés en 2019 et 950 000 nm3 (nanomètre cube) de gaz. 

En 2021, les carburants ont connu un fort renchérissement en Bourgogne-Franche-Comté, de l’ordre de 20 % sur l’année, sous l’effet de la montée du prix du baril de pétrole. Constitués à près de 60 % de taxes en France, leurs prix sont élevés comparés à nos voisins européens. La région compte 613 stations-services. Globalement, les prix sont légèrement plus faibles dans l’urbain. Et localement, les écarts peuvent être plus marqués.

 

La France figure parmi les pays de la zone euro où les prix des carburants sont les plus élevés. La voiture est le mode de transport largement privilégié, en Bourgogne-Franche-Comté, comme partout en France. Près de 80 % des actifs occupés de la région l’utilisent pour se rendre au travail. L’utilisation de la voiture pèse dans le budget des ménages français qui consacrent en moyenne 11 % de leur revenu disponible aux transports individuels en 2017. Le poste carburant représente, à lui seul, 3,2 % de leur budget.

 

Comment est calculé le prix du carburant ?

Tout d’abord, les carburants sont taxés, à hauteur de 56 % pour le gazole par exemple. Leurs prix sont très volatils car ils subissent les fluctuations importantes du cours du baril de pétrole, soumis à la loi de l’offre et de la demande au niveau mondial. Au coût du pétrole, s’ajoutent ceux du raffinage et de l’acheminement. Le distributeur répercute ensuite ses coûts de fonctionnement et s’accorde une marge. Et à cela, s’ajoutent enfin les taxes spécifiques. En 2021, les prix des carburants augmentent en raison de la reprise de l’économie mondiale qui entraîne une forte augmentation de la demande à l’issue des restrictions engendrées par l’épidémie de la Covid-19. Entre le début et la fin d’année 2021, le prix du gazole augmente de 21 % en moyenne dans les stations-services de Bourgogne-Franche-Comté. Ce renchérissement est plus important que celui de 2018, lors de la crise des gilets jaunes.

 

613 stations-services dans la région, et des prix très variables

La Bourgogne-Franche-Comté compte 613 stations-services proposant au moins un des six types de carburant cités précédemment. Le gazole est proposé dans toutes les stations, le SP98 dans 80 %, l’E10 et le SP95 dans environ 60 %. Les autres carburants sont beaucoup moins vendus et moins fréquents dans les points de distribution. Les stations-services sur autoroute pratiquent des prix plus élevés par rapport à celles implantées ailleurs. En moyenne, les prix au litre des quatre principaux carburants sont 11 % plus élevés. Les 582 stations implantées hors autoroute pratiquent des prix généralement plus faibles mais assez différents. Elles sont pour près de 60 % d’entre elles, des stations de grandes surfaces. Ces dernières pratiquent des prix généralement plus homogènes et globalement 3 à 4 % plus faibles que les autres. Les autres types de points de distribution sont les stations des majors pétrolières et les « indépendantes » dans lesquelles les prix sont généralement plus élevés. Quel que soit le type de station-service, les carburants sont identiques et issus des mêmes procédés de raffinage.

 

Plus de stations dans l’urbain de densité intermédiaire

Les stations-services sont relativement plus fréquentes dans les territoires de densité intermédiaire et dans le rural autonome. Ces territoires comptent respectivement 36 et 33 stations pour 100 000 véhicules contre 29 en moyenne dans la région. Les volumes de carburants distribués y sont probablement plus faibles que dans les zones plus urbanisées. Dans les territoires de densité intermédiaire, la forte concentration des automobilistes favorise l’implantation des points de distribution en carburant. Dans le rural autonome, les automobilistes sont dispersés sur de vastes territoires et ces points doivent également être nombreux et dispersés pour répondre aux besoins des consommateurs.

 

Des prix à la pompe légèrement moins élevés dans l’urbain

Les territoires urbains denses, composés surtout de Dijon, Besançon, Montbéliard et Belfort, sont les moins équipés en stations-services. On en compte 18 pour 100 000 véhicules. Elles sont peu souvent liées aux grandes surfaces, lesquelles sont surtout implantées dans les périphéries des villes. En fait, leur activité principale, voire unique, est la distribution de carburant. Pour être rentables, ces stations sont souvent localisées le long d’axes majeurs pour bénéficier d’un flux important d’automobilistes. Ce sont celles qui offrent la plus grande variété de carburants et les prix du gazole et du SP95 sont globalement un peu plus faibles dans l’urbain dense qu’ailleurs, notamment 1 à 2 % moins chers que dans le rural autonome. Dans l’urbain dense, les stations-services sont concentrées sur des territoires peu vastes, relativement proches les unes des autres, ce qui les place directement en concurrence. Elles peuvent pratiquer des prix plus bas car elles tirent parti de volumes vendus plus importants.

 

David Brion, adjoint du chef de service, responsable des études à l’INSEE :