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Le collectif SOS Loue et Rivières Comtoises tire la sonnette d’alarme suite aux vagues successives de mortalités de poissons. Les plus récentes, en décembre 2022 sur le Doubs franco-suisse et en février 2023 sur la Haute Loue, alertent de la dégradation globale de la qualité des rivières comtoises qui se poursuit depuis plusieurs décennies. L’assainissement, la pollution industrielle, le traitement du bois, et toutes les pollutions agricoles sont en cause. Selon le collectif, l’intensification de l’agriculture amène une situation où la production n’est plus en équilibre avec les milieux naturels.

 

Un champignon mortel dans une eau dégradée

« Depuis 2010, la situation des rivières comtoises est catastrophique. Ça a démarré avec la Loue, ensuite avec le Dessoubre, puis des épisodes de très forte mortalité de poisson sur le Doubs franco-suisse. La situation est très préoccupante depuis maintenant 12 à 13 ans Â» indique Gérard Mamet, membre du collectif, et vice-président de la commission locale de l’eau Haut-Doubs/Haute-Loue au titre des usagers de l’eau. Depuis plusieurs jours, des observateurs ont constaté la présence de nombreux poissons, particulièrement des salmonidés, malades ou morts. Depuis plus de 13 ans, le collectif SOS Loue Rivières Comtoises lutte pour préserver la santé des cours d’eau de notre territoire, surtout après le drame qui s’est abattu sur la Loue en 2009, conduisant à une impressionnante mortalité de poissons due à la saprolégniose. « Ce champignon, présent dans l’eau depuis toujours, ne se développe sur les animaux que s’ils sont affaiblis, si leurs défenses immunitaires sont considérablement affaiblies par un milieu naturel qui est très dégradé. Le saprolégnia ne s'attaque pas à des poissons en bonne santé dans un milieu naturel de bonne qualité Â» explique Gérard Mamet.

 

Quel type de pollution ?

Le milieu naturel est dégradé de différentes manières. Premièrement, il y a le problème de l’assainissement qui n’est pas satisfaisant aujourd’hui, selon le collectif. De nombreuses stations d’épuration ne répondraient pas correctement aux normes qui leur sont imposées. Par ailleurs, les pollutions d'origine industrielle, les pollutions liées au traitement du bois, et les pollutions d'origine agricole, notamment des résidus de médicaments utilisés pour traiter les animaux, dégradent très fortement les cours d’eau, tout comme l’excès de lisier qui se retrouve rapidement dans les réseaux souterrains et dans les rivières. « L’intensification de l'agriculture amène une situation où la production agricole n’est plus en équilibre avec les milieux naturels. Si on veut revenir à une situation plus normale pour les poissons, il faut diminuer en partie la production agricole, il faut désintensifier pour retrouver une agriculture en équilibre avec son milieu Â» souligne Gérard Mamet.

 

« Comment est-ce qu'on peut tolérer ça, aujourd'hui, dans un pays riche ? De ne pas s'occuper de la qualité de l'eau ? C'est tout à fait à notre portée, on a les moyens, on connaît les actions, maintenant il faut y aller » Manon Silvant du collectif SOS Loue Rivières Comtoises.

 

Une liste de 73 propositions

Un certain nombre de mesures ont déjà été prises, mais ces dernières ne sont pas à la hauteur, selon le collectif. « Cet hiver, les mortalités n’ont jamais été aussi importantes, aussi bien sur le Doubs franco-suisse qu’aujourd’hui sur la Loue. On a eu deux vagues de mortalités importantes en décembre sur le Doubs franco-suisse du côté de Goumois, et puis plus récemment sur la haute vallée de la Loue, au-dessus d’Ornans Â» indique Manon Silvant du collectif SOS Loue et Rivières Comtoises. Ce collectif qui a d’ailleurs soumis une liste de propositions, issues d'un travail de longue haleine durant plusieurs années, avec des scientifiques, des acteurs de terrain, des pêcheurs, et toutes les équipes techniques. Une liste qui n’a pas été prise en considération. « Nous avions un document de 73 propositions qu’on a on a réduit en 3 domaines pour ce début d'année 2023. L'assainissement, la sylviculture et l'agriculture. Dans ces 3 domaines, on a regardé tous les points où on pouvait réduire ce qui cause une pollution des rivières. Comme les engrais du côté de l'agriculture, mais aussi le lisier. Et concernant l'assainissement, tous les rejets des eaux usées. Il y a vraiment des marges de progrès absolument énormes à faire. C'est fou qu'on ne s'y attelle pas avec plus de ferveur et de passion au niveau de tous les politiques, de toutes les administrations de Franche-Comté Â» souligne Manon Silvant. Après avoir rédigé ces 73 propositions pour sauver les rivières comtoises, le collectif vient d’envoyer un nouveau recueil de suggestions d’urgence à 60 destinataires.

 

Gérard Mamet, membre du collectif, et vice-président de la commission locale de l’eau Haut-Doubs/Haute-Loue au titre des usagers de l’eau : 

 

L’Agence de l’eau Rhône Méditerranée Corse a publié son nouveau rapport sur l’état des eaux et des nappes des bassins Rhône-Méditerranée et de Corse. Il s’appuie sur 5,5 millions d’analyses de surveillance annuels. En Bourgogne-Franche-Comté et Grand Est, seulement 26% des rivières sont en bon état écologique et 83% des nappes souterraines affichent un bon état chimique, selon les données de l’Agence de l’eau. Plusieurs facteurs sont en cause, comme le changement climatique, l’artificialisation des sols ou encore le cloisonnement des milieux aquatiques.

Une qualité d’eau qui s’améliore, mais de nombreuses substances encore présentes

Laurent Roy, le directeur général de l’Agence de l’eau Rhône Méditerranée Corse, affirme pourtant que la qualité de l’eau a considérablement augmenté depuis une trentaine d’années. En partie grâce à l’assainissement et les nombreuses stations d’épuration. Des substances qui étaient autrefois omniprésentes dans l’eau comme l’ammonium ou encore le phosphore ont très fortement diminuées. Cependant, les analyses ont révélé la présence de 500 substances toxiques, dont la moitié sont des pesticides.

Plus de 500 substances retrouvées dans les cours d’eau, dont de la caféine et des médicaments

Parmi toutes les substances retrouvées dans les cours d’eau, il y a notamment la caféine, présente dans près de 80% des rivières, mais également des substances chimiques comme les pesticides, glyphosates, les produits phytosanitaires ou encore des produits de la vie quotidienne et de nombreux médicaments. « On a tendance à en retrouver partout. La solution c’est de vraiment en réduire les usages à la source quand c’est possible Â» indique Laurent Roy, directeur général de l’agence de l’eau Rhône Méditerranée Corse.

Limiter le cloisonnement des rivières

En Bourgogne-Franche-Comté, plus de 80% des cours d’eau ont été modifiés, deux fois plus que dans le bassin méditerranéen. L’artificialisation est l’un des principaux facteurs qui menace le bon fonctionnement des cours d’eau. Avoir des rivières, des zones humides et des plans d’eau suffisamment naturels pour que la biodiversité puisse bien s’y porter est essentiel. Les cours d’eau ont beaucoup été artificialisé au cours des décennies précédentes et qu’il faut désormais « renaturer, avec des aspects sinueux, des berges plus variées, pour que les écosystèmes aquatiques refonctionnent Â» explique Laurent Roy.

 

 

 

C’est à la station d’épuration de Bians-les-Usiers ce mercredi que Jean-François Colombet, le préfet du Doubs, Béatrix Loizon, la vice-présidente du Département, et les différents partenaires ont signé le plan « rivières karstiques Â». L’objectif est d’améliorer la qualité des eaux dans les prochaines années par le biais d’actions concrètes, de résultats visibles, en apportant l’aide nécessaire aux projets locaux.

Depuis le début des années 2010, les rivières comtoises, notamment la Loue, connaissent une dégradation de la qualité de leurs eaux. Les acteurs du département du Doubs ont ainsi engagé une démarche collective afin de réduire les différentes pollutions aquatiques et de tendre vers l’excellence environnementale sur notre territoire. Compte tenu de la nature karstique du sous-sol du massif jurassien, qui rend les rivières comtoises particulièrement vulnérables aux pollutions, cet objectif passe par un travail d’amélioration dans chaque secteur d’activité ayant potentiellement des impacts environnementaux afin de préserver les eaux des substances indésirables, et préserver le fonctionnement des écosystèmes aquatiques. Cette exigence est d’autant plus renforcée dans un contexte de changement climatique, qui accentue les pressions sur les milieux aquatiques du département.

« La restauration de la Loue et des rivières comtoises demandera un effort long et continu de tous, mais, d’ores et déjà, la conférence départementale de l’eau a permis d’initier une dynamique et de tracer la voie vers la reconquête. Ce plan vise donc, par l’ensemble des thématiques et des actions qu’il embrasse, à reconquérir la qualité des eaux de rivières karstiques et de notre département, et préserver la ressource disponible. Piloté à un niveau resserré, il a vocation à fédérer l’ensemble des acteurs pour une action efficace et visible à l’échelle de notre territoire Â»

Depuis plus d’une dizaine d’années, la mortalité piscicole s’est accentuée dans le département, et les pollutions s’accumulent dans les rivières. Pour faire face à ces phénomènes, les élus du département ont pris des engagements ce mercredi à Bians-les-Usiers en lançant le plan « rivières karstiques Â» dont l’objectif est de favoriser « une reconquête de la qualité des eaux Â». A travers ce plan, Jean-François Colombet, le préfet du Doubs, a détaillé quatre axes majeurs de cette politique environnementale : gouverner, connaître, agir et communiquer. « Gouverner ce dispositif parce que l’eau est un sujet complexe et hyper technique. Il faut regarder chaque action, évaluer, réformer, pour obtenir de meilleurs résultats, que l’on obtiendra par des actions coordonnées autour d’une task force Â» explique Jean-François Colombet. Par l’anglicisme « task force Â», le préfet du Doubs entend une force d’intervention qui regroupe l’État, le Département, l’EPAGE Haut-Doubs-Haute-Loue, Doubs-Dessoubre et l’Agence de l’eau. « Puis connaître, car de nombreux sujets échappent encore à notre connaissance collective. Il faut savoir ce qui est pertinent ou non. Ensuite, il faut agir. Agir sur la qualité, l’usage et les milieux. Par exemple, concernant le plan fromagerie, il ne s’agit pas de stigmatiser une profession, car beaucoup de fromageries coopèrent et seulement quelques-unes impactent leur milieu. Mais nous le savons. Pour les plus récalcitrants et parfois les plus puissants, nous utiliserons le pouvoir que nous confère la loi. Il a fallu 30 ans pour former l’image de marque du comté, et en trois mois, on peut la mettre en l’air. Je ne laisserai pas faire ça Â». Jean-François Colombet a indiqué qu’il avait signé plusieurs mises en demeure et « deux astreintes Â» ces derniers jours. D’ailleurs, deux fromageries ont été condamnées au mois de juin par le tribunal de Besançon.

Enfin, le préfet du Doubs a rappelé son devoir de transparence. « Trop souvent on nous reproche de cacher les choses, cette époque est révolue. Nous mettrons devant la presse toutes les actions, les résultats insuffisants et échecs, mais aussi nos objectifs futurs, et nos succès, qui je l’espère, seront nombreux Â».

La première « task force Â» est prévue en mai 2023.

 

Jean-François Colombet, préfet du Doubs : 

 

Depuis maintenant quelques semaines, le beau temps s’est installé dans la région. Les lacs et cours d’eau se réchauffent et nombreux sont les baigneurs qui se jettent à l’eau. Mais les sapeurs-pompiers du Doubs appellent à la prudence. Les rivières et plans d’eau présentent de nombreux pièges pouvant mettre en péril la vie des baigneurs. Il est important de connaître les dangers et les précautions à prendre. Depuis le début du mois de juin, déjà 2 décès sont à déplorer pour des noyades dans le département.

"Les rivières regorgent de pièges"

Les sapeurs-pompiers du Doubs indiquent que même si la canicule incite à se rafraîchir, il est strictement interdit de se baigner dans les lacs et rivières du département, hors zones de baignades référencées et autorisées, le risque de noyade étant toujours présent. En effet, même si la rivière semble calme, elle contient en son sein des pièges pour le nageur qui peut y risquer sa vie, notamment :

- Des courants forts non détectables en surface qui entraînent la victime vers le fond (tourbillons)

- Des rochers et corps invisibles en raison de l’opacité de l’eau qui présentent des obstacles inattendus pour le nageur comme pour le plongeur.

« Un malaise peut aussi survenir dans l’eau hors surveillance Â», souligne le capitaine Jules Bevalot, adjoint au chef du CTA-CODIS. « Ce dernier ne pourra alors être pris en charge rapidement, contrairement à un malaise sur la voie publique Â» poursuit-il. « L’opacité de l’eau peut ajouter des difficultés complémentaires pour retrouver la victime, même avec peu de fond Â».

Les consignes des sapeurs-pompiers 

- Les sapeurs-pompiers du Doubs invitent donc la population à respecter les consignes suivantes pour éviter des drames :

- Prévenir un proche avant d’aller se baigner

- Ne pas surestimer sa condition physique

- Ne pas entrer brutalement dans l’eau par temps très chaud, après une exposition au soleil, après un repas ou après avoir consommé de l’alcool

- Ne pas plonger d’un pont ou d’un point haut non prévu à cet effet (méconnaissance de la hauteur d’eau et des obstacles immergés)

- Privilégier les zones de baignade surveillées