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Meurtre en bande organisée : 8 individus identifiés pour le meurtre de Houcine Hakkar

C’est un énorme coup de filet au terme d’une enquête longue et fastidieuse que vient d’effectuer la police de Besançon aux côtés de plusieurs autres services. Un travail d’ampleur mené depuis la course poursuite ayant eu lieu le 8 mars 2020 avenue Siffert à Besançon, qui avait conduit à la mort de Houcine Hakkar. Ce jeune de 23 ans avait été la victime collatérale des règlements de compte sanglants entre deux bandes rivales de trafiquants de drogue. Ses agresseurs avaient poursuivi le véhicule qu’il conduisait en le mitraillant à l’aide d’armes lourdes, alors qu’il roulait dans une voiture d’un ami à lui, similaire à celle que les malfaiteurs recherchaient. 8 individus ont été identifiés grâce à un décryptage massif de données et un travail d’ampleur du JIRS de Lille. 6 d’entre eux ont été interpellés et présentés à la justice hier et aujourd’hui. Le septième avait été interpellé au début du mois de mars en Espagne. Le dernier quant à lui est toujours en fuite. Ils devront être présentés à la cour d’assises pour « meurtre en bande organisée Â» et encourent la réclusion criminelle à perpétuité. 

Une riposte meurtrière

Les faits remontent au 8 mars 2020, avenue Siffert à Besançon. Houcine Hakkar, ce jeune mécanicien de 23 ans, sort à peine de la douche lorsqu’un ami à lui vient le récupérer pour lui faire essayer la voiture qu’il vient d’acheter : une Mégane « sombre Â». Un véhicule qui sera confondu par les assaillants lors de la soirée funeste. Alors qu’il circule dans les rues de Besançon avec son ami, placé côté passager, il est soudain pris en chasse par une voiture, depuis laquelle des coups de feu partent en leur direction. Une course-poursuite s’engage, et les malfaiteurs les tamponnent jusqu’à ce que la voiture de leurs victimes s’encastre dans un poteau. Houcine Hakkar n’aura pas le temps de s’enfuir contrairement à son ami, et sera abattu d’une balle dans la tête. "Le tireur avait pris soin de faire une entaille sur la tête de l'ogive. Ce sont des méthodes de tueur", précise Etienne Manteaux, le procureur de Besançon. Au total, 28 traces d'impact ont été relevées sur la voiture, plusieurs balles perdues dans la rue, ainsi que dans l’appartement d’une vieille dame, fort heureusement inoccupée lors du terrible l’incident.

Une guerre entre deux clans

Cette fusillade est liée à la série de violences et de tentatives d'assassinats constatées de décembre 2019 à mars 2020 Ã  Planoise, entre deux bandes rivales. Dans ce quartier sensible, dit de reconquête républicaine de l'ouest de Besançon, vivent 20.000 habitants, indique Etienne Manteaux. Quelques jours auparavant, le 6 mars, une série de tirs s’était produite à nouveau dans le quartier. Les enquêteurs vont alors faire le lien entre ces affaires, en s’imaginant une vengeance de la part de la bande rivale. Mais très vite, le passager étant connu comme étant un sympathisant de ces hommes, le mobile est apparu trouble pour les forces de l’ordre. « Les investigations menées dans le dossier sur les tirs à Planoise ont permis de révéler que les tireurs de l’équipe adverse utilisaient une Mégane de couleur sombre. Les hommes de la rue de Picardie qui étaient en chasse de cette voiture se sont trompés Â» souligne Etienne Manteaux. Et aujourd’hui c’est une certitude, Houcine Hakkar n’était pas visé.

Une messagerie cryptée, un vivier d’informations

C’est la juridiction interrégionale spécialisée de Lille (JIRS), qui dans le cadre d’une affaire de trafic de stupéfiants a identifié des téléphones sécurisés par une technologie très poussée. Les enquêteurs ont tout de même réussi à décrypter un logiciel nommé « Sky ECC Â», leur permettant d’obtenir d’innombrables données sur des affaires criminelles en Europe. Par ce biais, le parquet de Besançon a pu obtenir les fichiers concernant l’assassinat de Houcine Hakkar et la période concernée. Par la retranscription de ces données, et la mise en parallèle de ces dossiers, une compréhension extrêmement fine de ce qu’il s’est véritablement passé a pu être établie. « Une fois ces données obtenues, elles ont pu être exploitées par les enquêteurs pour comprendre ce qu’il s’est passé, minute par minute Â» souligne le procureur de Besançon. Les auteurs de l'opération utilisaient des téléphones "PGP" (Pretty Good Privacy), qui permettent d'avoir un haut niveau de protection et de confidentialité, sur lequel le logiciel est installé et transfère les messages de manière cryptée.

Parmi les messages décryptés :

  • "On tue deux, trois personnes, les gens vont voir qu'on ne parle pas chinois. Tout Besac va être à nous".
  • "On va leur faire une vraie descente MP5" (en référence au fusil mitrailleur qui a d’ailleurs été utilisé pour l'assassinat de Houcine Hakkar). On tue, ça va les calmer Â»
  • "Je viens de me faire allumer. On m’a tiré 10 fois dessus, j’étais obligé de plonger. Il faut leur faire une dinguerie, ils visaient les têtes ces fils de pute. On va aller cramer la tour Â»
  • "On les a tamponné plein de fois jusqu' à ce qu'il fasse un accident puis la balle dans la tête".

Huit personnes impliquées, six interpellées

Sur les 8 personnes ayant eu recours à cette messagerie cryptée, six ont été interpellées ces jours-ci. Deux d’entre elles ont été déférées ce jeudi devant le parquet de Besançon, deux l'ont été ce matin et deux autres cet après-midi. Au total, cinq personnes ont été placées en examen, et la sixième sera bientôt présentée au juge d'instruction. Dans les heures qui viennent, ils comparaîtront devant le juge des libertés et de la détention. Quant à la septième personne, il s’agit de l’homme arrêté dans un hôtel de Barcelone au début du mois de mars dernier, et sous le coup d’un mandat d’arrêt. La huitième personne présumée coupable est en fuite. Mais « la justice est patiente Â» argue Etienne Manteaux. « La vie de fugitif n'est pas simple. Je vous dis avec certitude que cet individu sera un jour ou l'autre présenté à un juge et placé en détention compte tenu des attaches familiales qu'il a ici", a-t-il affirmé. Ces individus seront jugés pour "meurtre en bande organisée", et encourent la réclusion criminelle à perpétuité.